Colloque « Littérature et Libre Pensée » : un succès !

 

Les 14 et 15 février 2020, se sont tenues,à la Bourse du Travail à Paris puis dans le Salon Médicis du Sénat, à l’initiative de l’Association Octave Mirbeau et de la Libre Pensée, deuc journées de colloque passionnantes.

De l’avis des intervenants et de tous les participants, ce premier colloque devra être suivi par beaucoup d’autres, tant le sujet est vaste et passionnant.

Les Actes seront disponibles au cour de la fin du troisième trimestre 2020.

 

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” Nous dénonçons une restriction sans précédent de l’accès aux archives contemporaines de la nation “

Communiqué

L’IRELP (Institut de Recherches et d’Etudes de la Libre Pensée) s’associe à la  protestation des historiens ci-dessous, qu’il porte à la connaissance de ses adhérents et correspondants. L’IRELP s’inquiète des limitations portées de fait à la  recherche historique qui ne peut être que libre et, en rien dépendante des décisions étatiques.

Nous demandons, avec les historiens signataires, l’application du code du patrimoine et de la loi sur les archives de 2008, et donc l’accès immédiat et sans réserve à ces archives publiques à l’issue des délais légaux.

Pour l’IRELP,

Jean-Marc Schiappa, Président.

Paris le 13 février 2020

 

Nous dénonçons une restriction sans précédent de l’accès aux archives contemporaines de la nation

La décision de déclassifier un par un les documents postérieurs à 1940 portant le tampon « secret », dont la plupart étaient pourtant accessibles à tous depuis longtemps, porte atteinte à l’accès aux sources et bloque des recherches en cours, alerte un collectif d’historiens, qui en appelle au code du patrimoine

Faut-il encore s’inquiéter de l’accessibilité au public des plans du débarquement du 6 juin 1944, soixante-quinze ans après la seconde guerre mondiale, lesquels portent un tampon « secret » ? Protéger des informations secrètes est essentiel. Qui en douterait ? A condition toutefois que ces informations soient réellement sensibles et qu’elles constituent toujours un secret-défense. Quand il n’y a plus de secret, il ne devrait plus rien y avoir à protéger.

Pourtant, le service historique de la défense annonce la nécessité d’une « déclassification » formelle de tous les documents portant les fameux tampons « secret » depuis 1940. Pièce par pièce. Cette mesure provoque déjà une paralysie du service. Elle entraîne des délais de communication très longs, voire l’impossibilité d’accéder à des archives pourtant communicables de plein droit selon le code du patrimoine. En effet, les archives dont la communication porte atteinte au secret de la défense nationale, aux intérêts fondamentaux de l’Etat dans la conduite de la politique extérieure, à la sûreté de l’Etat, à la sécurité publique doivent être accessibles à tous après une échéance de cinquante ans.

Tout le paradoxe est là : des délais d’accessibilité existent pour ces documents et ces délais sont aujourd’hui largement échus pour la majeure partie des documents produits avant 1970. Mais on évoque une instruction générale interministérielle de 2011 pour justifier une nécessaire « déclassification » formelle des documents secrets avant toute communication aux lecteurs. Pourquoi cette soudaine volonté de déclassifier des documents considérés jusqu’à il y a peu comme accessibles à tous ? Pourquoi prendre le risque d’entraver gravement les recherches historiques ?

Au-delà du service historique de la défense, où la tâche est particulièrement titanesque compte tenu de la nature des archives qui y sont conservées, cette nouvelle mesure concerne toutes les archives publiques. Ce sont plusieurs centaines de milliers de documents et des dizaines de kilomètres linéaires de papiers qui doivent être regardés un à un au nom de cette application abusive, et partant dangereuse, du principe de protection du secret de la défense nationale exigée par le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale.

Une restriction sans précédent de l’accès aux archives contemporaines de la nation sous le prétexte abusif de la nécessité de protection du secret de la défense est en cours.

Acteurs et actrices de la recherche en histoire, nous dénonçons la mise en œuvre de cette mesure sans qu’aient été expliquées et débattues publiquement ses motivations et ses modalités et, au-delà, sans qu’aient été mises en place les conditions techniques permettant de garantir dès à présent la continuité et la pérennité de l’accès aux archives publiques.

Communicable de plein droit

Depuis la Révolution française, la République garantit aux citoyens un accès aux papiers de l’Etat, accès qui est considéré comme une protection indispensable contre l’arbitraire, et le code du patrimoine stipule que les archives publiques sont communicables de plein droit, sous réserve de délais de communicabilité pour certaines d’entre elles. Cette dérogation au principe d’une publicité universelle et immédiate de l’action publique vise autant à protéger la vie privée des individus qu’à garantir l’efficacité et la sûreté de l’Etat. Elle garantit à la fois la sécurité et la liberté des citoyens. Cet équilibre doit être assuré par une limitation dans le temps des restrictions de communicabilité.

Aujourd’hui, toute personne qui divulguerait des informations contenues dans des archives tamponnées « secret-défense » sans déclassification préalable s’expose à des poursuites pénales pour compromission du secret de la défense nationale. Or certains de ces documents ont été massivement communiqués depuis des années, voire des décennies. Les livres d’histoire sur la seconde guerre mondiale et les guerres de décolonisation les citent abondamment et les reproduisent parfois. En tirant le fil jusqu’à l’absurde, tous leurs auteurs s’exposent à des poursuites, de même que les responsables de fonds qui leur ont communiqué ces documents de toute bonne foi.

Quelles que soient les motivations à l’origine de ces nouvelles consignes, elles placent les archivistes dans une situation impossible. Elles menacent le patrimoine de la nation. Des documents déjà anciens risquent d’être endommagés, peut-être irrémédiablement, par l’opération concrète de déclassification, que ce soit à cause du tampon, des encres ou de l’inscription.

Au-delà de la dimension patrimoniale, ces mesures portent un coup d’arrêt brutal à la recherche sur des sujets essentiels pour la connaissance historique et le débat public dans notre démocratie. Les archives ayant été, à un moment de leur vie, classifiées ne concernent pas que l’histoire militaire : elles permettent d’écrire l’histoire de la nation. Dans les mois à venir, et si rien n’est fait pour débloquer la situation, il sera de facto impossible de travailler sur nombre de sujets portant sur l’histoire de France depuis 1940.

Travail politique mémoriel

Pour faire face à la désorganisation, le ministère des armées annonçait, le 11 février, dans la précipitation, des « moyens supplémentaires ». Quand seront-ils déployés ? Comment ? Rien n’est dit à ce sujet. Le blocage est d’ores et déjà effectif : des recherches sont désormais en attente, faute d’accès aux sources. Force est de constater que certains travaux majeurs sur l’histoire de la France contemporaine publiés ces dernières années ne pourraient plus être écrits aujourd’hui par des historiens travaillant aux archives françaises.

Faut-il en revenir à ce qui prévalait lorsque l’historien américain Robert Paxton, au début des années 1970, a dévoilé l’ampleur de la politique de collaboration menée par Vichy… à partir des archives allemandes car les archives françaises étaient fermées ?

Depuis le grand discours de Jacques Chirac de 1995 sur la rafle du Vel’ d’Hiv, les présidents de la République affirment régulièrement la nécessité de faire toute la transparence sur le passé de la France, même le plus délicat, et de réconcilier les mémoires des Français. En janvier, le président Macron a exprimé son souhait que les archives de la guerre d’Algérie ne soient plus réservées aux seuls historiens, afin qu’un « travail politique mémoriel » puisse être entrepris. Contre cette volonté d’ouverture et de transparence présidentielle affirmée depuis un quart de siècle par des gestes concrets (dérogations générales de 1998 et 2015 sur les fonds de la seconde guerre mondiale, par exemple), cette pratique, qui vise à contrôler voire à refermer des documents historiques déjà archivés, apparaît comme une régression majeure.

Au moment même où commencent les commémorations de l’année de Gaulle, dont celle du 80e anniversaire de l’appel du 18 juin, la fermeture de fait pour une durée indéterminée des archives classifiées postérieures à 1940 a de quoi surprendre. De la même manière, alors que le président s’apprête à rendre hommage à l’engagement militaire des harkis, et tandis que se profilent les soixantièmes anniversaires du putsch d’avril 1961 et de la fin de la guerre d’Algérie, l’écriture de cette histoire, pourtant essentielle à la compréhension des enjeux contemporains, est largement compromise. Il est vain de prôner un quelconque devoir de mémoire si l’impératif d’histoire ne peut concrètement être rempli.

Rappelons-le : ces archives ont, pour l’essentiel, déjà été communiquées. Il n’y a donc plus de secret. Et s’il en reste, il est temps, cinquante ans au moins après les faits, de lever le voile dans le cadre fixé par la loi. Par conséquent, nous demandons l’application du code du patrimoine et de la loi sur les archives de 2008, et donc l’accès immédiat et sans réserve à ces archives publiques à l’issue des délais légaux.

Marc-Olivier Baruch, directeur d’études, EHESS ; Jean-Marc Berlière, professeur des universités émérite, université de Bourgogne ; Emmanuel Blanchard, maître de conférences, université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines ; Raphaëlle Branche, professeure des universités, université Paris-Nanterre ; Pierre Journoud, professeur des universités, université Montpellier-3 ; Julie Le Gac, maîtresse de conférences, université Paris-Nanterre ; Chantal Metzger, professeure des universités émérite, université de Lorraine ; Denis Peschanski, directeur de recherche, CNRS ; Henry Rousso, directeur de recherche, CNRS ; Anne Simonin, directrice de recherche, CNRS, EHESS ; Fabrice Virgili, directeur de recherche, CNRS, université Paris-I-Panthéon- Sorbonne ; Olivier Wieviorka, professeur des universités, ENS Paris-Saclay

Nous, historiens et historiennes de la France contemporaine depuis des décennies, sommes consternés par les conséquences néfastes de l’instruction générale interministérielle de 2011 (IGI 1 300). Nous avons salué la volonté du président Macron d’ouvrir les archives touchant à la disparition de Maurice Audin et plus largement aux disparus de la guerre d’Algérie. Nous sommes d’autant plus surpris qu’au même moment l’application de cette instruction introduise un régime plus restrictif que celui qui prévalait antérieurement et notamment depuis la loi de 2008.

Une situation digne de Kafka

Des documents que nous avons déjà exploités, même publiés, dans nos ouvrages, pourraient se trouver désormais fermés aux chercheurs. Il est déjà arrivé à quelques-uns parmi nous de se voir refuser l’accès à des documents consultés il y a des dizaines d’années ! C’est une situation digne de Kakfa. Les travaux que nous avons effectués ne seraient plus possibles à mener dans les archives françaises.

Cette restriction qui, au mieux, ralentit de plusieurs mois ou années les travaux, et, au pire, les rend impossibles, représente une atteinte très sérieuse à la réputation internationale de la France dans le domaine de la recherche historique.

Les signataires de cet appel expriment donc leur vive inquiétude et demandent au président de la République de faire réexaminer cette instruction et ses modalités d’application, en conformité avec ses déclarations relatives à l’ouverture des archives.

Helga E. Bories-Sawala(université de Brême, Allemagne) ; Hanna Diamond(université de Cardiff, Royaume-Uni) ;Valeria Galimi(université de Florence, Italie) ;Robert Gildea(université d’Oxford, Royaume-Uni) ;James House(université de Leeds, Royaume-Uni) ; Julian Jackson(université Queen Mary de Londres, Royaume-Uni) ;Eric Jennings(université de Toronto, Canada) ;Harry Roderick Kedward (université du Sussex, Royaume-Uni) ;Robert O. Paxton (université Columbia, New York, Etats-Unis) ; Renée Poznanski(université Ben-Gourion, Israël) ; Mary Louise Roberts(université du Wisconsin, Etats-Unis) ;Martin Thomas(université d’Exeter, Royaume-Uni)




Lettre du Conventionnel Montagnard Dartigoyete

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